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Conférences de Solange Anastasia Chopplet
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16 mai 2023

L’EXISTENTIALISME EST UN HUMANISME

CORRIGE COMMENTAIRE DE TEXTE JEAN-PAUL SARTRE

 

En vue d’une conférence donnée à Paris en octobre 1945 Sartre choisit pour sujet l’ «Existentialisme est un humanisme » ce qui donna lieu à une publication éponyme dont est tiré le présent extrait.
La conférence fit scandale car elle remettait en question des siècles de philosophie essentialiste,  invarnée par le christianisme .
Pour Sartre il s’agissait de définir l’existentialisme et de justifier son caractère humaniste alors qu’on l’accusait de mener au désespoir dans un monde sans Dieu et par conséquent dénué de sens, c’est-à-dire absurde.
Le texte commence par le pré-requis à toute défense de l’existentialisme, l’explicitation de son principe : l’existence précède l’essence, puis l’auteur en indique le présupposé : Dieu n’existe pas et en déduit les conséquences : l’homme se choisit et par conséquent il est libre, or s’il est libre il est responsable et pas seulement de lui-même mais de l’humanité toute entière puisque ses actes ont une valeur d’exemplarité. Ce qui fait par conséquent l’intérêt philosophique de ce texte est de définir l’homme moderne en termes de conscience, de liberté et de responsabilité pour soi et pour autrui, ce qui justifie que l’existentialisme soit un humanisme.
D’emblée l’auteur définit l’existentialisme comme la théorie qui soutient que l’existence précède l’essence et non pas l’inverse comme la philosophie le soutenait depuis l’antiquité.
Qu’est-ce qu’exister? C’est étymologiquement, ex-sistere, se tenir hors de, ce qui développe le champ lexical du surgissement, du projet, de la projection. La conscience n’a pas d’intériorité, « la conscience est comme un grand vent », toujours emportée, toujours à l’extérieur, rencontrant l’altérité. Il n’y a rien en elle si ce n’est un mouvement vers. Aussi n’y a-t-il pas de nature innée, prédéterminée. Celle-ci se fait en faisant des choix qui sont fonction des conditions factuelles qui sont celles que rencontre l’homme : être né ici et à cette époque, dans telle culture, avec tel physique, être un être au travail, destiné à mourir, mais aussi condamné à être libre. C’est donc au cours de cette existence contingente, car l’homme aurait pu ne pas apparaître, ni non plus tel ou tel individu, qu’il se définit c’est-à-dire se donne les limites qu’induisent ses choix parmi tous les possibles qui s’offrent à lui.
Or si l’homme est dépourvu d’essence c’est parce qu’il n’y a pas de Dieu créateur qui pourrait le concevoir à la façon d’un artisan fabriquant un objet. En ce cas une essence prédéterminée présiderait aux choix de l’individu. Mais comment dès lors conjuguer cela avec son exigence de liberté? A une condition répond Sartre, afficher un athéisme radical et en conséquence affirmer que l’homme « n’est d’abord rien » entendons rien de défini. Certes il est doué de potentialités propres à son espèce mais rien, si ce n’est ses choix, n’assure qu’elles seront actualisées.
Il est un rien sans l’être car affirmer qu’il n’est rien serait le définir. Et Sartre de préciser que « l’homme n’est rien d’autre que ce qu’il se fait ».
Son existence ne consiste pas à développer son essence, c’est exactement le contraire. Son existence construit son essence ou du moins ce qu’il sera et par quoi on le définira.
L‘homme est ainsi défini comme un élan, un pro-jet, c'est-à-dire qu’il est jeté devant lui.

Ceci étant établi Sartre en tire les conséquences, si du moins on accepte l’hypothèse de l’existentialisme. La conséquence majeure est la responsabilité qui définit la liberté. Etre responsable, c’est répondre de ses actes à ses yeux et aux yeux d’autrui.
A ses yeux cela signifie qu’on ne peut se trouver de bonnes excuses pour se justifier de tel ou tel choix malheurs, famille, éducation, société, caractère. On comprend que Sartre définit dès lors la liberté comme une condamnation car bien souvent on se cherche des excuses bonnes ou mauvaises. Mais, alors, comment revendiquer d’être un être libre?. C’est tout ou rien. La liberté est entière ou n’est pas.
La leçon est difficile à accepter comme l’illustre la pièce de Sartre « Huis clos » et pourrait mener au désespoir ou à la folie, quoiqu’on y échappe en général par la mauvaise foi en ne se reconnaissant pas responsable des conséquences de ses actes.
L’existentialisme rappelle donc l’homme à la cohérence entre ses choix et leurs conséquences. Il lui fait prendre conscience de ce qu’il est :un être libre.
Mais il n’est pas seulement responsable de lui-même de sa « stricte individualité » mais des répercussions effectives de ses actes sur autrui, c’est-à-dire de la  valeur d’exemplarité qu’il confère à ses choix en les ayant effectués. Nous sommes donc consciemment ou non des exemples pour autrui. Ainsi si je mens, je cautionne le mensonge en tant que valeur qu’autrui pourrait adopter.
En affirmant cela Sartre évite le reproche de nihilisme qu’on pourrait lui faire. Il ne cautionne pas tous les choix mais met en garde contre leur valeur d’exemplarité car nous choisissons toujours ce que nous considérons comme bien. On ne va pas choisir ce qui nous nuirait, mais la question se pose de savoir si ce qui est bien pour moi l’est en soi.
Or sachant que mon choix a une valeur d’exemplarité, autrui peut opter pour la même maxime d’action, persuadé qu’elle est bonne puisque je l’ai choisie.
La conscience d’une « responsabilité totale » et, l’on peut ajouter radicale, dont l’existentialisme veut faire prendre conscience, prouve que celui-ci est un humanisme c’est-à-dire qu’il place l’homme au centre de ses préoccupations et manifeste à son égard le respect auquel aspire l’homme en tant que personne.

En conclusion ce texte bien qu’il ait un caractère de vulgarisation touche à la question cruciale de la liberté de l’homme laquelle ne peut qu’être entière. On n’est pas plus ou moins libre, on l’est ou pas. Or en présence de multiples limites, intrinsèques et extrinsèques, institutionnelles ou  non,  la question de la liberté est cruciale. Faut-il y renoncer? Ce serait alors renoncer à sa qualité d’homme, mais l’affirmait Rousseau,la liberté se paye  donc du prix d’une responsabilité angoissante devant laquelle on recule.
L’homme en définitive et malgré ses protestations veut-il être libre?


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