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Conférences de Solange Anastasia Chopplet
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5 juillet 2021

VERITE OU OPINION ?

POURQUOI RECHERCHER LA VERITE PLUTOT QUE DE S’EN TENIR A L’OPINION?

 

A première vue l’opinion qui consiste à émettre un jugement fondé sur une « impression » est préférée à la vérité, d’autant que chacun prête à son opinion une forte valeur de vérité, qui rend inutile d’en douter. Alors pourquoi faudrait-il rechercher la vérité plutôt que de s’en tenir à l’opinion?

Pourquoi préférer une vérité qui dérange, qui s’avère difficile à établir, qui requiert du temps alors qu’on en manque et que la vie exige qu’on ait un avis sur tout et qu’on fasse des choix rapides?

Manifestement l’opinion nous arrange, bien plus nous conforte dans nos habitudes de vie et de pensée et évite, qui plus est, de s’affronter aux autres lorsque notre opinion se confond avec l’opinion publique consensuelle. Dès lors même si l’on se trompe on n’en porte pas la responsabilité laquelle est déléguée au groupe, que ce soit la famille éducative, la société, les médias… C’est du reste ce que signifie l’Allégorie de la caverne de Platon.

L’opinion est un confort surtout si elle est partagée. Elle n’est pas exigeante, ne requiert pas une argumentation, il suffit de « penser personnellement que ». Elle s’impose ainsi comme une évidence et celui qui n’est pas « convaincu » n’a en fait rien compris. L’opinion est,croit-on, évidente, normale, naturelle et ne souffre pas de contestation.

Ainsi que l’a souligné Kant dans son opuscule « Qu’est-ce que les Lumières » elle nourrit la paresse et la lâcheté. Paresse de véritablement penser par soi-même au lieu d’être pensé par les autres ; lâcheté d’affronter des avis divergents voire des menaces comme c’est le cas du prisonnier qui redescend dans la caverne quitte à y laisser la vie.

Mais le prix  de l'opinion est lourd à payer c’est celui de la liberté. Paradoxalement alors qu’on croit affirmer sa liberté en exprimant son opinion c’est tout le contraire qui se passe puisque l’opinion c’est la croyance  partagée d’un groupe même  si on s'en défend.

On peut dès lors se demander s’il ne serait pas préférable de rechercher  la vérité si l’on veut préserver sa liberté.

 Tel qu’il est formulé le sujet présuppose que la vérité est et qu’elle doit être recherchée.

Mais ce sont deux affirmations problématiques. Que signifie que la vérité est? Comment la définir? Quels domaines en témoignent -ils ? Selon Platon, comme l’illustre l’Allégorie, la vérité se dévoile progressivement à condition de douter de ce en quoi on croit ; de s’avouer selon la formule de Socrate « qu’on ne sait qu’une seule chose c’est qu’on ne sait rien » ; de s’arracher aux impressions des sens ; d’apurer sa pensée de toutes les illusions ; de ne pas craindre de perdre sa vie ; de souffrir car difficile est le chemin. Il faut donc une détermination inébranlable pour y parvenir.

En outre le mot d’ordre de la vérité, sa condition de possibilité première est  comme nous l’apprendra Descartes : le doute, un doute volontaire, hyperbolique, systématique ne laissant pas  place au moindre doute.

La vérité apparaît alors comme le fruit du travail de la raison .Mais si les mathématiques peuvent en témoigner puisqu’elles sont formelles, tel n’est pas le cas des sciences expérimentales et des sciences humaines dont  la validation des théories  tient à  l'experience Mais il n'empêche  que les scientifiques ne prétendent pas pour autant  à la vérité absolue de leurs théories, ils lui préfèrent  probabilités et hypothèses et vont d’erreurs corrigées en erreurs corrigées sans exclure la possible réfutation de leurs résultats .Comme le souligne Karl Popper "une théorie est vraie tant qu'on n'a pas demontrée qu'elle était fausse"

 Faut-il dans ce cas renoncer à la vérité et lui préférer l’opinion, surtout lorsqu’il s’agit d’agir, de poser les bases d’une morale et d’interagir avec autrui?

 Renoncer à la vérité, c’est renoncer d’une part à la connaissance, d’autre part à la liberté et confondre vérité et vraisemblance. Dans ces conditions comment espérer progresser, comment vivre ensemble?

Ne trouverait-on pas absurde de dire que le théorème d’Euclide est une opinion? Ou que la formule d’Einstein relève de son avis personnel? Certes il ne s’agit pas de vérités métaphysiques mais leurs théories se veulent objectives, démontrables et partageables, elles s’étendent à tous les phénomènes et ne sont pas contingentes comme c’est le cas des opinions.

Cependant tout n’est pas démontrable et nombre de nos décisions reposent sur nos opinions quant à ce qui est bon ou mauvais, vrai ou faux. Par ailleurs les situations génèrent des comportements divers et variés plus ou moins justifiés, comme l’affirmait Pascal « Vérité en deçà des Pyrénées, mensonge au-delà ». Faut-il alors admettre que chacun a sa vérité, autrement dit que son opinion a valeur de vérité?

Chacun agirait selon ce qui l’arrange et ce serait la loi du plus fort, du plus rusé, en un mot du sophiste qui manipule l’opinion publique.

Il faut donc bien admettre qu’en l’occurrence l’opinion règne, mais est-elle condamnée à l’erreur, au mensonge, au désordre? Ne peut-on construire une ortho-doxa, une opinion droite qui aurait des exigences d’objectivité, de rationalité, qui serait fondée sur le doute, grâce au débat dont les prisonniers sont privés et qui est pour Platon, sous la forme du dialogue, la condition de possibilité d’une vérité approchée toujours ré interrogeable?

 A la question de savoir s’il faut rechercher la vérité, nous répondrons par l’affirmative ne serait-ce que pour éviter les regrets et les remords mais aussi pour défendre la liberté qui consiste à se donner sa propre loi en échappant aux manipulations.

 

ANASTASIA CHOPPLET

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