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Conférences de Solange Anastasia Chopplet
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14 juin 2021

L’ETRE HUMAIN A-T-IL BESOIN DE RELIGION?

L’ETRE HUMAIN A-T-IL BESOIN DE RELIGION?

Depuis le XIXème siècle les philosophes n’ont eu de cesse de proclamer la mort de Dieu et de dénoncer le caractère illusoire de la religion. Or malgré les réponses des sciences aux questions que traitait la religion, malgré les progrès de la technique, malgré les divergences entre les églises et les exigences morales de la société contemporaine la religion persiste, voire s’impose et de multiples mouvements religieux voient le jour. Est-ce à dire que la religion serait un besoin spirituel vital pour l’être humain au même titre que se nourrir, se protéger, en un mot se conserver en vie?

Il est vrai que depuis les temps les plus reculés l’homme semble manifester un souci du transcendant, du non visible, d’un tout-autre dont non seulement le monde mais lui-même se tiendrait, dont on attendrait aide et sécurité, mais que l’on redouterait aussi, en un mot qui serait sacré et se démarquerait du profane. Et c’est de cette dichotomie que serait née la religion laquelle qualifie d’une part un ensemble de croyances indubitables et d’autre part une communauté de croyants les partageant.

En tant que besoin, la religion devrait donc être nécessaire et universelle, ne plus se manifester une fois assouvie, procurer du plaisir, ne pas connaitre l’incertitude du choix, or tel n’est pas le cas de la religion, puisqu’on peut être athée ou agnostique, autrement dit ne pas en éprouver le besoin voire considérer que c’est un faux besoin induit par l’éducation et rendu obligatoire par la société ; le besoin de Dieu n’est jamais assouvi, au contraire et loin de procurer du plaisir il amène à s’interroger et à se heurter aux insurmontables contradictions d’un Dieu supposé bon et d’hommes faisant le mal au point que la religion loin d’assurer la survie, comme tout besoin, peut entraîner la mort.

On aurait alors à faire à un besoin contradictoire, qui en outre ne serait ni naturel, ni nécessaire.

Ne s’agirait-il pas plutôt alors d’un désir, ce frère jumeau du besoin?

En effet le désir, qui étymologiquement signifie la quête ou l’aspiration à l’étoile (aster) se définit comme un état de manque que l’on ne peut assouvir et que l’on veut assouvir sous peine d’ennui. Incertain, plus ou moins répréhensible, tombant sous le coup du jugement moral, libre et imprévisible il est du reste la bête noire de la religion qui en demande le sacrifice.

Mais en même temps la religion présuppose le désir de Dieu et seul cet élan vers lui permet d’expliquer la force irrépressible de l’amour de Dieu.

Or en tant que désir, c’est-à-dire manque, la religion se comprend mieux comme consubstantielle à l’homme, celui-ci exprimant le manque ontologique dont il souffre qui s’exprime sous la forme de sa misère intérieure qui a pour nom fragilité, déficience et mort. Mais par ce fait, la religion, si elle offre la certitude d’un bonheur post-mortem sous la forme d’une vie après la mort, nous laisse devant des réponses qui posent plus de questions encore…

Dès lors pourquoi croire? Et croire malgré tout, malgré Auschwitz? On peut bien sûr en imputer la faute à l’homme, mais on ne peut s’empêcher de penser que Dieu nous a bien abandonnés. Et pourtant certains en ont eu leur foi renforcée. Alors à quels désirs la religion offre-t-elle une satisfaction?

Tout d’abord à celui primaire qui s’apparente à un besoin de sécurité, de réconfort face à la maladie, la douleur, le vieillissement, la mort. Ce même besoin qui, explique Freud, fut assouvi par les parents pour protéger leur enfant. Ainsi devenu adulte il en conserverait le besoin et cette névrose infantile nous aurait fait élaborer cette illusion qu’est Dieu.

Suivrait le besoin de sens pour comprendre phénomènes et évènements et ainsi conférer un sens à notre existence.

Celle-ci aurait une cause et une finalité et ne serait pas l’objet de l’angoissant hasard. Nos actes auraient un sens voulu par Dieu, en dépit de la mort.

L’homo religiosus, comme le nomme Mircea Eliade, manifesterait ainsi un besoin de transcendance dépassant ses intérêts immédiats. Et il est vrai que l’homme cherche toujours à échapper à ses limites comme  en témoignent ses objets d’études et ses inventions. Pourquoi y-a-t-il quelque chose plutôt que rien?

La religion pallie aussi à des insuffisances sur le plan social en invitant à la fraternité, la bienveillance, la tolérance, du moins est-ce ce que préconisent les textes sacrés. Mais les sœur Emmanuelle et Abbé Pierre l’ont effectivement mis en pratique.

La religion offre aussi un complément à la justice humaine car si celle-ci châtie ponctuellement la religion en appel au remords qui est un châtiment à vie, et le prix de la vie éternelle est une lourde punition.

De la sorte la religion assure la survie de l‘homme social en palliant à la fatalité de la mort, à la dissolution de l’ordre social sous les forces conjuguées de l’égoïsme et de l’individualisme, enfin aux carences de l’intelligence qui s’avère incapable de répondre aux questions métaphysiques et existentielles de l’homme et qui n’a aucun pouvoir sur les évènements.

Enfin la religion, selon Feuerbach répondrait au désir que l’homme a de s’aimer en projetant hors de lui une figure parfaite de lui-même. Mais on n’est pas loin alors de dénoncer la religion comme une illusion sans aucun fondement.

Elle pourrait même n‘être qu’un opium destiné à soulager la douleur, mais aussi à endormir, offrant aux idéologues une arme efficace pour maintenir le peuple sous leur domination, voire justifiant les pires exactions sous prétexte que désobéir aux lois de Dieu serait mettre l’état en péril et vice versa.

Dès lors la religion ne serait ni plus ni moins qu’une idéologie déguisée répondant au besoin de domination de ceux qui ont le pouvoir. La religion dès lors ne remplit plus aucun des besoins et désirs qu’elle est censée satisfaire.

Mais pourquoi, dès lors, les hommes sont-ils encore pieux comme en témoigne le caractère quasi divin que nous conférons à la science et à la technologie?

 En conclusion nous voudrions poser deux questions .

Si l'être  est humain, au sens  moral du terme ,pourquoi aurait il besoin de religion puisqu'il serait pourvu de l'humanité  qu'elle serait  censée lui inculquer? S'il ne l'est pas la religion serait elle susceptible  de l'humaniser alors que ses pratiques la mettent  au rang d'une idéologie mortifère ?

En second lieu on pourrait s'interroger sur la formulation de la question pressuposant   que la religion répond à  un besoin de l'homme après tout ne serait -ce pas lui qui répond ou non à  un appel de dieu?

 

ANASTASIA CHOPPLET

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